« C’est avec une grande tristesse que nous avons appris la faillite de l’entreprise Durobor ce mardi matin. Nous voulons tout d’abord exprimer notre solidarité aux 150 travailleurs et travailleuses qui subissent une faillite malgré tous leurs efforts pour l’empêcher, notamment en acceptant des diminutions salariales, des horaires plus difficiles et qui ont vu de nombreux et nombreuses collègues partir au fil de ces années » déclarent Quentin Dumont et Clivia Reyckers, coprésident.e.s de la Locale Ecolo Soignies.

Durobor, fondée en 1928, est reconnue internationalement pour son savoir-faire, la qualité de ses verres et pour ses innovations comme les verrines. Mais l’entreprise a aussi été marquée par de nombreux coups durs. Les difficultés apparaissent dès 1997. Depuis, des repreneurs se sont succédé, souvent accompagnés de trop nombreux plans de licenciement avec des réductions de personnel toujours plus importantes.

Mais Durobor, c’était surtout une histoire qui a impliqué des générations de Sonégiens et de Sonégiennes, des travailleurs et travailleuses et leurs familles. Ces familles ont participé à la renommée de Durobor et par extension à la renommée de Soignies dans le monde entier. Aujourd’hui, nous nous devons d’être aux côtés de toutes ces personnes.

Benoit Leclercq y a travaillé quand il était jeune et rappelle que « La Ville de Soignies a toujours soutenu les travailleurs et travailleuses de Durobor. Le Collège communal refuse de baisser les bras tant que toutes les possibilités, tous les scénarios n’ont pas été examinés un à un avec l’ensemble des acteurs économiques concernés ».

Avec Valentine Place, ils ont voulu donner la parole à ceux et celles qui ont vécu l’histoire Durobor de l’intérieur et qui se sont investis cœur et âme dans cette entreprise, à ces salarié.e.s pour qui Durobor était bien plus qu’un travail. C’est notamment le cas pour Yvan Rouard, qui travaille pour Durobor depuis 33 ans, depuis son entrée en 1986. Son père y est entré en 1949 et toute la famille s’y est succédé. « Cela fait 70 ans que le nom de Rouard est dans les registres de l’entreprise », nous a-t-il confié.

Yvan nous a parlé des conditions de travail de plus en plus difficiles chez Durobor. En tant que dernier ouvrier fraiseur de l’entreprise, il constate qu’il est presque impossible de trouver des fraiseurs pour Durobor car le salaire y est très bas. Depuis 2012, son salaire a effectivement diminué de 19 %, sans compter la suppression de nombreuses primes (prime d’équipe, de changement, de formation, de rappel, etc.). A côté des diminutions salariales, il a été aussi été demandé plus de flexibilité et de polyvalence. Pas cette flexibilité qui permet de concilier vie professionnelle et vie privée mais celle où l’on se retrouve toujours en sous-effectif. Au relevage où il a travaillé, il a vu défiler plus de 3600 verres par heure, des cadences qui finissaient par donner le tournis. A ce poste, ils devraient être trois mais ils se retrouvaient souvent seulement à deux.

Durobor, c’était une famille. Ils travaillaient ensemble 40h par semaine, mangeaient ensemble, se connaissaient, discutaient et se confiaient parfois. Voir partir ses collègues a été très difficile pour lui et pour tous les autres.

Pour Yvan, le projet d’une nouvelle entreprise a été mal calculé et ne s’est donc jamais réalisé. Durobor n’a jamais été modernisé, les machines sont vétustes et l’entreprise a manqué d’investissements qui étaient essentiels pour moderniser les outils et permettre une meilleure rentabilité. Il regrette que les intérêts financiers soient passés avant les intérêts de l’entreprise.

Pour le moment, les travailleurs et travailleuses sont dans l’attente. Les curateurs sont arrivés jeudi matin pour estimer ce qu’il était possible de faire pour honorer les commandes en cours.

Yvan sera pensionné dans 19 mois avec une carrière de 45 ans et, pourtant, il aura une pension certainement plus petite que son salaire chez Durobor. « Je pense surtout à ces collègues qui ont 10 – 15 ans de moins que moi et j’espère que Durobor reprendra et que ça continuera le plus longtemps possible. Beaucoup auront du mal à retrouver un travail alors que ce sont de bons ouvriers ». Selon lui, Durobor a un avenir mais cela nécessite des investissements !

A la fin de son entretien, Yvan a voulu terminer sur une touche d’espérance « Tout ce que j’espère, c’est qu’un bon investisseur – technique et non financier – vienne remettre de l’ordre et de nouvelles machines plus performantes. Avec de nouvelles machines, on pourrait aller plus vite. »

Si le scénario de la faillite se confirme, la priorité sera de trouver des mesures pour aider les travailleurs et travailleuses à retrouver un emploi et pour qu’ils reçoivent des indemnités pour pouvoir vivre dignement, comme ce fut le cas pour Caterpillar à Charleroi avec le plan CATCH. Valentine Place rappelle la détermination d’Ecolo à aider ces travailleurs et travailleuses et précise « Nous soutenons les syndicats et leur volonté de mettre en place une cellule de reconversion professionnelle afin de les aider à retrouver un emploi le plus vite possible ».

Le Groupe Ecolo